Petites difficultés d'existence

«J'ai décidé de t'aimer à mort.» Voilà ce que Carmen lit sur le billet que Terry lui a écrit (mais est-il possible de décider d'aimer quelqu'un ?). Après la naissance d'Etienne, leur fils, Carmen travaille comme serveuse chez Dooly's, tandis que Terry s'occupe du petit. Il a lu tous les livres qu'il a pu trouver sur le Yi King (serait-il un intellectuel ?) et il interroge tous les jours l'oracle (quel est le meilleur système de divination : les seize billes de couleur ? les cinquante tiges d'achillée ?).Il voit aussi leur ami Zed, qui depuis qu'il va prendre un café chez Joe Moka est de plus en plus artiste (comment se transmet l'amour de l'art ? par osmose, par frottement ?). Zed restaure un vieil édifice en bordure de la ville pour en faire des lofts et une sorte de foyer culturel. Parmi ses premiers locataires, il compte Etienne Zablonski, que Terry et Carmen avaient rencontré l'année précédente en Europe, et sa femme, Ludmilla, qui ont décidé de venir s'installer à Moncton.Toute cette activité, tous ces questionnements agissent comme un ferment dans l'esprit de Carmen et de Terry, ouvrant des perspectives insoupçonnées, semant des inquiétudes inédites. Cela remet tant de choses en question, jusqu'à la langue qu'ils parlent en présence de leur fils (est-ce que, tout comme la cigarette, il ne faudrait pas interdire le chiac aux enfants de moins de dix-huit ans ?).